L'exploration, clé cachée de l'innovation : pourquoi les "nez en l'air" avancent plus vite que les autres
Et si le secret des innovateurs n’était pas dans la concentration extrême, mais dans leur capacité à explorer sans se perdre ? Décryptage d’une approche radicalement efficace.
T’arrive-t-il d’avoir la bonne idée, une vision claire, de la motivation et malgré tout de ne pas savoir par où commencer ?
Ça m’arrivait lorsque je travaillais dans l’innovation. Je visualisais mes projets avec rapidité et clarté mais au moment de passer à l’action…le flou.
Ce que je voyais comme un avantage se transformait en frein et j’ai voulu comprendre pourquoi.
J’ai profité de ma proximité avec des chercheurs, des innovateurs et des entrepreneurs pour observer leurs méthodes et comprendre ce qui bloquait.
Un détail m’a rapidement surpris, les “nez en l’air” avançaient plus vite que les “têtes dans le guidon”.
Ils n’étaient pas juste plus rapides, ils dominaient le jeu et donnaient l’impression d’une surprenante décontraction .
J’étais bouche bée. Leur approche était l’exact opposé du bon sens et j’ai dû la mettre en pratique moi-même pour y croire.
Des résultats sans commune mesure
D’abord, laisse-moi préciser que je ne parle pas d’un sentiment de réussite. Je parle de personnes qui :
développaient des solutions bien plus attirantes,
avaient leurs nom sur toutes les lèvres,
attiraient les talents comme des aimants,
avaient des résultats financiers hors standard,
Là où ça devient vraiment passionnant, c’est que leur méthode n’implique pas de journée à rallonges, ni la meilleure technologie, ni les plus gros cerveaux.
Il s’agit de quelque chose considéré comme superflu.
Tu peux commencer maintenant
Avant de rentrer dans le détail, voici un outil basique issu de ce que j’ai observé : la “Micro Learning Expedition”.
Ouvre un Google Maps, et identifie 3 à 5 organisations à proximité de ton bureau et la personne qui t’y intéresse le plus (pas des prestataires),
Écris une phrase d’accroche qui résume ton intérêt,
Ouvre Linked In et envoie ta demande aux personnes que tu as identifiées.
Exemple :
Ton google maps : tu es à Brest et tu bosses dans la cosmétique. Près de toi (moins d’une heure) : une école de design, le plus gros imprimeur de la région, un centre européen destiné au cinéma…
Ton message d’intérêt : “Bonjour, je travaille à mixer packaging et digital et je pense que votre expérience pourrait beaucoup m’apprendre. Disponible pour un échange ? ”.
Depuis ton compte Linked In, cherche les personnes que tu as identifiées, fais une demande de connexion et inscrit ton message dans la note qui l’accompagne.
J’ai fait faire cet exercice à plusieurs dizaines de personnes et ce qui se passe près d’elles les a toujours faites avancer bien plus rapidement qu’elles ne l’auraient cru.
Et si ça t’inquiète, sache que les personnes répondent quasiment toujours et que c’est très souvent pour accepter l’échange.
La règle que les innovateurs brisent
Les innovateurs que j’ai observés cassent systématiquement un paradigme qu’on nous a inculqué dès le plus jeune âge. Mais avant de le détailler, regardons ce que nous faisons de contre-productif :
Nous sommes fiers de nos idées, nous pensons qu’elles valent de l’or et nous en sommes l’avocat.
Seulement voilà, les innovateurs qui réussissent ne font rien de tout ça. Ils ne voient leurs idées que comme des outils, des sondes leur permettant de collecter de l’information.
Rentrons dans le détail.
Tous les innovateurs et les entrepreneurs qui vont plus vite que les autres ne tombent pas amoureux de leurs idées mais les utilisent pour identifier le prochain pas :
Ils les livrent en pâture à la critique,
Ils s’en servent comme d’un sésame pour ouvrir les portes les mieux gardées,
Ils en font des traits d’unions,
Au lieu de se retirer dans leurs grottes et de danser autour du brasier fascinant de leurs idées, ils préfèrent en porter les braises vers l’extérieur en espérant allumer des feux biens plus grands.
Pourquoi c’est une approche radicale ?
Cette démarche d’ouverture est en contradiction avec notre système d’apprentissage :
Si tu copies sur ton voisin, tu seras puni.
Si tu donnes la réponse à ton voisin, tu seras puni aussi.
Si tu ne parviens pas à réciter ta poésie et que l’on te souffle, tu seras encore puni.
On nous programme à réussir grâce à la seule puissance de notre intellect et à nos connaissances durement acquises. Seul entre nos deux oreilles. Tout seul au milieu des autres, qui nous jugent.
Une rébellion salvatrice
Le problème c’est qu’à part dans quelques milieux, cette vision des choses est un moule que l’on aurait dû briser il y a longtemps.
Comment croire que dans le monde actuel ces principes sont encore porteurs alors que la véritable réussite se fonde désormais sur la capacité à créer des ponts ?
Un immobilisme létal
Tu peux breveter toutes tes idées et faire signer des NDA aux personnes qui s’y intéressent. Tu risques simplement de rater le prochain pas, de rester bloqué sur place ne comprenant pas pourquoi une idée si belle ne trouve pas le chemin pour avancer.
Bien plus que des porteurs de projets
Les innovateurs que j’ai observés m’ont enseigné qu’ils sont bien plus que des experts, ou des créatifs.
Ce qu’ils sont, c’est ce qu’ils font : ils défrichent des territoires, ils se confrontent au monde extérieur, ils apprennent de leurs expériences et ils s’adaptent.
Des explorateurs concentrés
Par leur attitude “nez en l’air” ils soufflent dans leur propre voile et en comparant leurs idées avec celles des autres, ils activent des leviers de performance :
Ils accumulent des informations progressivement plutôt que de les acquérir dans l’urgence.
Ils constatent ce qui a fonctionné ou pas et évitent les erreurs bêtes.
Ils font des croisements de secteurs qui deviennent des avantages compétitifs.
Et comme ils connaissent leur destination, ils articulent toutes ces informations pour mettre en lumière le chemin qu’ils vont emprunter.
Des créateurs de lien
En réalité, ces entrepreneurs ne tirent pas leur succès exclusivement de leur intelligence, de leur génie, ni de leur aura.
Ils récoltent avant tout les fruits du partage qu’ils ont eux-mêmes semé.
Casser le moule de l’approche scolaire
Ce qui est inconfortable, c’est que les règles sont bien ancrées dans notre cerveau et qu’elles nous font porter un regard négatif sur les “nez en l’air”.
Changer de paradigme
Je pense que nous ne devrions pas vouloir changer notre perception du monde mais plutôt changer notre rôle dans ce monde.
Si tu te vois comme un “innovateur”, un “expert”, une “directrice”, un “responsable”…tes biais vont venir en avalanche et tu vas t’épuiser à les combattre.
Si tu es un créateur de liens au service de l’innovation, des ressources humaines, du marketing, de la R&D, de la finance, tu pourras larguer les préjugés comme on largue les amarres.
Casse le moule et fabrique en un tout neuf qui sera bien plus adapté à notre époque.
Tu es un créateur de liens
Tu es ce que tu fais. Tu n’es pas ce que tu penses.
Si tu veux établir des liens pour améliorer la performance et l’innovation dans ton organisation, tu peux t’inspirer de ce que font les innovateurs que j’ai observés :
Dire ce que tu cherches,
Partager ce que tu trouves,
Voir chaque échange comme une occasion d’apprentissage,
Poser des questions qui apportent autant aux deux parties,
Considérer les critiques comme de simples informations,
Accepter de quitter ton chemin pour mieux y revenir,
T’intéresser à toutes les découvertes, pas seulement aux tiennes,
S’inscrire dans la durée
Il en reste une qui est un peu la cerise sur le gâteau et qui relève plus de la courtoisie que de l’exploration : renvoyer l’ascenseur.
C’est l’une des plus importantes car quoi qu’une exploration ait put t’apporter dans l’immédiat, c’est aussi sur le long terme qu’elle peut s’avérer payante.
Renvoyer l’ascenseur, c’est de petites choses, comme par exemple :
envoyer un remerciement accompagné du lien vers un article abordé lors de la rencontre.
partager une photo que l’on a prise en lien avec un sujet important pour notre interlocuteur et lui donner un peu de détail.
Car si tu le fais, tes interlocuteurs seront plus enclin à le faire et tu auras alors une multitude de “veilleurs” susceptibles de te remonter une information ou de te parler de ce qu’ils rencontrent et qui pourrait t’être utile.
Pour recevoir il faut savoir donner, dit-on.
L’Addict de découverte
Dans ma méthode d’accompagnement au changement, j’ai incarné cette capacité d’exploration par le personnage de l’Addict de découverte.
L’Addict de découverte sait que les meilleures idées existent déjà quelque part et il part les chercher ailleurs. Il ne se contente pas d’observer, il tisse des liens, partage et adapte ce qu’il apprend.
Son mantra : "La prochaine grande idée est peut-être à l'autre bout du monde ou au coin de la rue…allons voir !"
Une vraie Addict : Hedy Lamarr, actrice et inventrice autodidacte, qui a développé le saut de fréquence, technologie à la base du Wi-Fi et du Bluetooth (c’est elle sur la photo plus bas).
1 capacité sur 5
Il y a en tout 5 capacités pour faire de la curiosité un système de performance :
L’envie incarnée par l’Enthousiaste de coeur
L’intuition incarnée par l’Alchimiste des émotions
L’exploration
Le partage incarnée par le/la Bibliothécaire du possible
L’expérimentation incarnée par l’Architecte d’Autrement
Voici un article pour découvrir chaque capacité, son incarnation et un personnage clé.
Soif de partage
Cet article repose sur mon expérience du développement économique et de l’accompagnement à l’innovation pendant 15 ans, puis sur mon expérience au sein de Super Super en tant que consultant et facilitateur depuis 5 ans.
J’ai travaillé avec des dizaines d’entreprises, de toutes tailles et de tous secteurs. Il relate ma perception des choses basée sur une pratiques au plus près des questions qui se posent dans les organisations.
J’aimerais qu’il puisse faire naître une conversation entre les personnes qui le lisent.
Je prendrais beaucoup de plaisir à répondre aux questions, à compléter mon propos ou lire des avis différents et je t’invite à me laisser un commentaire sur les réflexions que cet article a provoqué chez toi.
Tu peux aussi le relayer auprès de toi. Il pourrait être utile à quelqu’un d’autre.
La curiosité au travail est l’articulation de l’envie, de l’intuition, de l’exploration, du partage et de l’expérimentation. Je te parle de chacune de ces dimensions dans ma newsletter “Vivisection”. Si tu veux en faire un système pour rendre ton organisation ou ton équipe plus performante, je propose des formations et des accompagnements sur le terrain.
Tu peux m’écrire à : ronan@supersuper.fr